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barricade du faubourg saint antoine. payse éditions

LA BASTILLE

La barricade située à l'entrée du faubourg

Saint-Antoine, Paris

18 mars 1871

Photographies de barricades de la Commune de Paris 1871 

Fonds J.&J. Chatelut

Dans l’Enquête parlementaire sur l’insurrection du 18 mars 1871,  on peut lire   :  « Un assez grand nombre d’ouvriers maçons, appartenant au canton de Saint-Benoît-du-Sault, qui chaque année émigrent vers Paris, ont été compromis dans l’insurrection et sont actuellement détenus à Cherbourg, à Belle-Ile, à Oléron. On en compte une cinquantaine environ. »

Ce nombre est déjà impressionnant pour un canton qui compte environ 5000 habitants. Mais en réalité, on a pu dénombrer, pour ce canton, 98 emprisonnés, dont au moins 75 maçons.

Si l’émigration des ouvriers du bâtiments était connue, on ne pouvait en soupçonner l’importance et encore moins cette participation à l’insurrection parisienne.

 

Le but du livre est de faire connaître ces premiers résultats, certainement très incomplets dans l’espoir que d’autres chercheurs les compléteront.

 

Le livre s’intéresse à deux sujets

    - l’origine de ces migrants et leur vie à Paris

    - leur participation à la Commune et la répression qui s’en est suivie

ceci pour un territoire partagé également entre le sud de l’Indre et le nord de la Creuse et de la Haute-Vienne.

Combien étaient-ils, qui étaient-ils ? 

On a pu recenser pour ce territoire  674 personnes arrêtées

280 pour le sud de l’Indre, 100 pour le nord de La Haute-Vienne et un peu moins de 300 pour le nord de la Creuse.

Cet échantillon ne représente qu’une partie de la migration de ces régions, il y manque tous ceux qui ont été tués, ceux qui ont échappé aux arrestations en fuyant Paris ou en se cachant.

Mais c’est le seul dont on dispose.

À travers les registres d’écrous, les comptes rendus des Conseils de guerre, les listes d’embarquement pour la déportation, on peut connaître pour la plupart, leur nom, leur âge, leur commune de naissance, la composition de leur famille pour certains, quelquefois leur taille, leur métier, leur adresse à Paris, le bataillon de la garde nationale où ils combattaient, quelquefois la date de leur arrestation et leur condamnation.

Leur vie à Paris

Ils quittent leur pays vers la mi-mars et y reviennent fin novembre quand le temps n’est plus propice à la construction.

Certains logent dans des garnis où ils peuvent s’entasser jusqu’à plus de trente dans la même salle au confort des plus sommaire, d’autres avec quelques compagnons seulement, quelques-uns enfin commencent à s’installer définitivement avec leur famille.

Dans tous les cas on ne les retrouve dans 4 quartiers seulement.     

Le matin ils ont souvent plusieurs heures de marche pour atteindre leur chantier où leur présence est de 12 h. Ils ont droit à deux poses vers 9 ou 10 h avec une soupe et du bœuf bouilli et un casse croûte vers 14 ou 15 h.

Ils gagnent entre 3,80 frs et 4,90 frs alors qu’un pain de 4 livres coûte 0,90 frs et un litre de vin 0,80.

Beaucoup  trouvent le moyen de faire quelques économies qui leur serviront à payer les dépenses de leur famille restée au pays et certains à acquérir quelques terres pour agrandir leur propriété.

Le livre reproduit le très long et intéressant article consacré aux maçons dans le Larousse du 19è siècle, justement dans son édition de 1872, qui décrit tous les aspect de leur métier et rappelle combien sont nombreux les accidents sur ces chantiers.

Quelle a été leur participation à l’insurrection ?

Ceux qui étaient présents à Paris en 1870, y ont appris, le 2 septembre, la capitulation de Napoléon III à Sedan et le 4 ont peut-être, avec la foule, envahit le Conseil législatif pour proclamer la République. Nous n’en avons pas de traces.

 

En février 1871, la plupart ne sont pas arrivés quand Thiers signe l’abandon de l’Alsace et la Lorraine et le 2 mars quand les allemands défilent sur les Champs-Élysées et Paris se couvre de drapeaux noirs

Mais ils sont là quand Thiers tente en vain le 18 mars, de s’emparer des canons de la Garde nationale et doit se retirer avec l’Assemblée à Versailles. Puis quand le Comité central de la Garde nationale fait procéder, le 26 mars, à l’élection d’un conseil communal qui prendra le nom de Commune de Paris.

 

Cette Garde nationale qui comptait 60 bataillons composés essentiellement de citoyens aisés, passe alors à 250 bataillons et doit ainsi recruter des ouvriers et des artisans. C’est certainement le moment où les ouvriers du bâtiment s’engagent dans cette armée populaire.

Dès le 2 avril, après une attaque des troupe de Thiers contre Paris, la Commune tente une sortie vers Versailles. Gédéon Lechapt, originaire de Saint-Maurice-la-Souterraine, est fait prisonnier et est fusillé sur le champ sans jugement. D’avril à mai des combats se poursuivent dans les banlieues et autour des forts jusqu’à ce que, le 21 mai, les troupes versaillaise entrent dans Paris. En une semaine elles progresseront jusqu’aux hauteurs de Belleville où sera réduite la dernière barricade.

Pendant cette semaine sanglante, les troupes de Mac Mahon fusilleront sans discernement et massivement.

Le bilan est ainsi de 877 tués du coté versaillais, tandis que les historiens estiment entre 20.000 et 30.000 les victimes des combats et des exécutions sommaires du coté des parisiens.

Les 17.000 sépultures payées par Paris    Il manquait 100.000 ouvriers à Paris

 

Dans le même temps 38.568 insurgés ou prétendus seront arrêtés. C’est parmi ceux-ci que se trouvent nos 674 concitoyens.

Que sont-ils devenus ?

Ils sont conduits à pied dans différents bâtiments de Versailles où ils resteront enfermés dans des conditions indignes. Après un rapide  interrogatoire, environ 30.000 sont transférés dans des ports de l’Atlantique, dans des forts désaffectés ou des cales de bateaux réformés.

Après plusieurs mois ou quelques années, certains sont libérés, les autres sont renvoyés, dans la région parisienne, devant 26 Conseils de guerre qui fonctionneront jusqu’en 1875.

Parmi les 674 que nous connaissons, 8 sont condamnés aux travaux forcés, 104 sont condamnés à la déportation dont 36 en enceintes fortifiées, 11 au bannissement, 69 à la prison en France.

 

Les forçats et déportés sont conduits en Nouvelle Calédonie en 20 convois qui s’étalent de mai 72 à juillet 78.

Enfermés dans des cages de fer, leur voyage dure de 4 à 5 mois. L’itinéraire le plus utilisé est celui qui passe au large de Dakar avant de gagner le Brésil à Santa Catarina, puis de nouveau l’Afrique au cap de Bonne Espérance, une descente vers le grand sud aux iles Kerguélen ou plus loin encore , puis un contournement de l’Australie par le sud et une remontée dans l’océan Pacifique jusqu’à Nouméa.   

On compte évidemment des morts pendant ces transports, comme pendant les retours huit à neuf ans plus tard.

En effet, dès la fin de 1871, une campagne pour l’amnistie est conduite par des parlementaires dont Clémenceau, Gambetta, Raspail, Victor Hugo. Elle n’aboutira qu’après la consolidation de la République et le succès des Gauches, avec une amnistie partielle en 1879 et totale en 1880. 

texte de Jean Chatelut

Extrait d'une conférence donnée à Gargilesse-Dampierre

articles dans la presse :

Les Amies  et Amis du Berrry de la Commune de Paris 1871

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